miércoles, 3 de febrero de 2016

Poétique de Racine







Poétique de Racine


Tandis que Corneille paraît toujours ressentir un secret dépit contre Aristote et ses commentateurs, Racine semble ne regarder les règles de la tragédie que comme les conditions nécessaires du genre. Cela tient à ce que la « crise morale » à laquelle Racine réduit toute sa pièce acquiert par les trois unités, loin d'en être gênée comme les actions historiques et implexes de Corneille, plus de concentration et de force.

— Racine choisit ses sujets dans la légende grecque ou romaine : une fois, dans Bajazet, il s'inspire d'un fait contemporain, mais lointain : deux fois, il a recours à la Bible.

— Tout son effort vise à rendre ce sujet vraisemblable : c'est-à-dire, étant donné un certain dénouement tragique fourni par la tradition, à le montrer, à le rendre nécessaire, par l'analyse approfondie des passions humaines qui l'ont produit. Aussi l’action, en elle-même, est-elle très simple. Entre l’exposition et le dénouement, aucun événement nouveau : rien que le jeu des sentiments. C'est ce que Racine appelle : « faire quelque chose de rien. »

— L'amour est, de toutes les passions, celle qui tient le plus de place dans les pièces de Racine. Mais, pour ne pas tomber dans la galanterie à la mode, Racine ne manque jamais de peindrel’amour jaloux. La jalousie est le grand ressort tragique de son théâtre, comme la volonté celui du théâtre de Corneille. Cependant, Racine n'a pas moins réussi dans l'analyse de l'ambition politique, de l'amour maternel, de l'amour ingénu : mais, en général, c'est l'amour tragique et jaloux qui mène l'action et qui provoque le dénouement.


 — De là, l'impression de vérité et de tristesse que laisse le théâtre de Racine. Corneille, en exaltant l'énergie et la volonté, nous amène à prendre confiance en nos propres forces ; Racine, en nous présentant un Pyrrhus, un Oreste, une Hermione, une Roxane, un Mithridate, une Ériphile, une Phèdre, jouets et victimes de passions violentes et cependant vraisemblables, nous oblige à faire un retour sur notre faiblesse. Seule la dignité des personnages et le recul de l'action peuvent rassurer les spectateurs : à la lecture, nous sentons que cette tragédie serait, en changeant les temps et les noms, le drame mo

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